ARK NETWORK reference.ch · populus.ch    
 
  
Krishnamurti, l'accomplissement 
 
 
Rubriques

Liens

 Home  | Livre d'Or  | Album-Photo  | Contact

Un processus

Krishnamurti, dès son plus jeune âge, est décrit comme un enfant éveillé au sens spirituel du terme. Il est possible de distinguer trois grandes périodes dans sa vie et dans le processus interne le menant vers la plus haute réalisation de lui-même. 
 
- Une période allant de sa naissance jusqu'à 1922 et que nous qualifierons de période religieuse. Les quatorze premières années de sa vie Krishnamurti fut soumis aux habitus de la culture indienne au sens le plus classique du terme. 
Enfant d'une famille de brahmanes il reçut l'enseignement traditionnel de la religion hindoue et subit l'influence d'une mère très portée sur l'occultisme. Il est alors immergé dans l'imaginaire indien très axé sur la religion. 
Entre sa quatorzième et sa vingt-septième année il va être conditionné par la société théosophique et être initié aux états modifiés de la conscience ainsi qu'aux expériences psychiques. 
Nous pouvons dire que durant les 27 premières années de son existence Krishna vit dans un monde ésotérique auquel il semble adhérer malgré une très grande solitude et une souffrance intérieure qui ne fera que croître, amenant peu à peu des questions, des doutes. 
Ces doutes, ces questions le feront peu à peu progresser vers lui-même et vers une quête de réponses. 
 
- La seconde période s'étend de 1922 à 1925. Nous l'avons vu, en 1922 Krishnamurti vit une expérience spirituelle nouvelle le menant vers la connaissance de l'unité, de l'état cosmique, de la non-dualité et l'expérience de visions, de sorties hors du corps. 
Ceci semble correspondre à une expérience spirituelle très importante le menant à affirmer que plus rien ne sera jamais comme avant. Cette expérience, décrite pour l'essentiel comme l'éveil de la kundalini9,est accompagnée de ce que Krishnamurti nomme le processus, c'est-à-dire de fortes douleurs à la base de la colonne vertébrale et à la nuque. 
Ces douleurs se manifesteront régulièrement, tout au long de sa vie, et semblent être apparues à chaque fois que Krishnamurti vivait un état d'illumination. Le processus reste un mystère dans la mesure où il semble être le seul mystique à avoir décrit ces sensations de douleurs à un moment où, d'habitude, les sages sont libérés de la souffrance. Cette seconde période le conduit vers une conscience illuminée et est accompagnée d'une phase créatrice durant laquelle Krishnamurti écrit de nombreux poèmes. 
Le processus interne de transformation de la conscience a soudainement changé de niveau ; Krishnamurti décrit cette modification comme sans relation de causalité avec les diverses "initiations" auxquelles il fut soumis par les théosophes. 
Nous nous interrogeons cependant sur cette réflexion reprenant le débat entre différentes écoles spirituelle bouddhiques sur l'illumination subite ou graduelle. Il semble évident que l'illumination apparaît subitement et l'éveil est simultané, mais, il apparaît également important de rappeler que Krishnamurti a subi toute une "éducation" durant laquelle il a, graduellement, acquis un certain nombre d'expériences et de savoirs, le préparant à un tel éveil, même si celui-ci semble survenir d'un seul coup. Rappelons également qu'au moment de cette expérience, Krishnamurti pratiquait la méditation, le yoga et récitait des mantras10. 
Dire qu'il n'y a pas eu de préparation à ce qu'il a vécu me paraît irréaliste et Krishnamurti lui-même est contradictoire lorsqu'il affirme qu'il n'y a aucune relation causale entre l'événement d'Ojai et l'enseignement reçu par les théosophes. Le conditionnement infligé par les théosophes l'a conduit vers une très grande souffrance et une très grande solitude ; n'est-ce pas cette souffrance qui l'a conduit vers la pratique de la méditation et du yoga? N'est-ce pas cette extrême blessure intérieure qui a provoqué des doutes? 
Krishnamurti n'était-il pas, à cette époque de son existence, en grand questionnement intérieur sur le sens de sa vie? N'effectuait-il pas une recherche solitaire sur lui-même? Il dit lui-même que la pratique de la méditation l'a conduit à une meilleure compréhension de certains événements de son passé. 
Ne peut-on pas poser l'hypothèse que l'endoctrinement théosophique l'a poussé jusqu'au bord ultime du désespoir et de la souffrance, que de cette souffrance un questionnement intérieur est né, une quête de sens menant vers la pratique de la méditation, vers un cheminement intérieur ouvrant à la connaissance de soi et conduisant à l'expérience spirituelle? 
Cette hypothèse semblerait contredire les écoles dites "gradualistes" reposant sur l'accumulation de pratiques et d'une culture spirituelle pour, ensuite, s'éveiller soudainement. Elle développerait l'idée que c'est la souffrance, la quête de la connaissance de soi qui conduisent vers l'éveil ou un changement de niveau de conscience menant vers l'ouverture spirituelle. 
Bien évidemment la connaissance de soi est graduelle dans le sens où elle s'effectue peu à peu, elle ne repose cependant ni sur l'accumulation de connaissances, ni dans l'apprentissage, mais plutôt sur la perte de ce que l'on connaît et sur le désapprendre afin d'aller vers ce qu'il y a au-delà des conditionnements. Se dépouiller de ce que l'on croit être et croit savoir, pour laisser l'être véritable se dévoiler. 
En ce sens, il serait peut-être possible de dire que l'éveil de Krishnamurti est "subit" et que c'est seulement après cet éveil qu'il a, graduellement, eu accès à ce qui lui était arrivé? 

 

 

 
- La troisième période commence en 1925 et va jusqu'à la mort de Krishnamurti. Cette troisième période survient à la suite du choc de la mort de Nitya. Krishnamurti fait alors l'expérience du renoncement radical et de l'acceptation. Renoncement de ses croyances que son frère ne pouvait pas mourir car il était utile à sa mission, et qu'il aurait dû être prévenu de cette mort par les maîtres avec qui il était en contact. 
Tout n'était donc qu'illusion ! Tout ce que les théosophes lui affirmaient depuis toujours était faux ! Le choc de cette révélation peut conduire l'homme au bord de l'abîme, du néant et il fait alors l'expérience du réel, de l’insupportable. 
Dans cette confrontation avec le réel il y a mort des croyances et des illusions . Ce renoncement est extrêmement douloureux ; l'homme est seul dans ce processus de renoncement qui débouche également sur une acceptation de ce qui est, de la vie telle qu'elle est. C'est une prise de conscience qui fait, une fois encore, changer le niveau de conscience de l'individu. 
Il accède alors à la véritable sagesse et à une authentique compréhension de lui-même et du monde et fait l'expérience du sacré, de cette " autreté ", ce sans nom, cette "otherness" qui transforme radicalement sa façon d'appréhender la vie. 
A la suite de cette expérience Krishnamurti prendra encore quatre années avant de se séparer définitivement des théosophes et assumer pleinement sa vie et sa responsabilité de citoyen du monde. 
Après la dissolution de l'Etoile d'Orient, il entre vraiment dans la liberté le menant à un accord total de lui-même et du monde. Il n'y a plus alors aucune notion de croyance mais une rupture radicale avec l'idée de la religion. 
Krishnamurti ne pose plus la question de Dieu, la question de la création comme s'il avait compris que tout aurait toujours été et qu'il y aurait un processus naturel de la vie permettant la transcendance de l’immanence. 
 
Juste après l'expérience de 1925, Krishnamurti vivra encore une période extrêmement créatrice durant laquelle il tentera d'exprimer, à travers la poésie, le sans nom, l'otherness, puis il cessera d'écrire et se consacrera à l'enseignement. 
Ce que Krishnamurti ne cesse d'affirmer à partir de 1929, c'est qu'il faut se libérer de nos conditionnements, de tout ce qui nous construit et qui est illusions, croyances, préjugés, pour accéder à la liberté. 
Apprendre à se connaître est le seul moyen de parvenir à découvrir qui nous sommes derrière le mur des conditionnements. C'est seul que l'homme doit cheminer ; personne ne peut faire le chemin à sa place. Il doit mourir à ce qu'il est pour renaître différent, vrai, authentique et faire l'expérience de sa vérité, de sa liberté et de sa compréhension du monde. 
Cela ne peut se produire sans ce renoncement total, radical de tout ce qui a été, du passé et sans une acceptation de ce qui est dans l'instant, d'instant en instant. L'enseignement de Krishnamurti est construit sur le doute et le questionnement. Il faut sans cesse tout remettre en doute et questionner ce qui surgit. 
 
Ce questionnement, essentiellement philosophique, permet une progression vers soi-même ; alors la personne se met en quête de réponses, devient un chercheur de vérité. Krishnamurti a développé une pensée complexe11, une pensée paradoxale portant en elle les germes de la tolérance. 
C'est en reconnaissant ses limites, l'incomplétude de ce que l'on affirme comme vérité, tant dans la science que dans la religion ou dans tout autre domaine, que l'on peut progresser dans la compréhension de soi-même et du monde. 
 
par J.Macrez 
 

 

(c) v patrick - Créé à l'aide de Populus.
Modifié en dernier lieu le 25.08.2009
- Déjà 4049 visites sur ce site!